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Gabriel Dill - magicien d’un univers abstrait

Prix Schläfli 2021 mathématiques

Pour son travail de maturité, il a écrit une satire sur Berlusconi - en latin. Et pour sa thèse, récompensée par le Prix Schläfli, il a choisi un domaine assez exotique, même pour les initiés: la géométrie diophantienne. Gabriel Dill aime les choses un peu compliquées.

Prix Schläfli 2021: Gabriel Dill
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Astrid Tomczak-Plewka

La personne qui dévore Ulysse pendant son temps libre, s’extasie sur la «magie» des équations mathématiques et passe des années à résoudre des problèmes dont 99,9% de la population n’est pas au courant doit accepter qu’on lui pose la question : «Êtes-vous un nerd?» Gabriel Dill prend le temps de réfléchir, cherche ses mots pour répondre sérieusement et adéquatement. «Je suis très enthousiasmé par les questions abstraites et aborder des sujets très éloignés de la réalité », dit-il enfin. Le terme «nerd» est un peu cliché.

Les mathématiques ont un aspect très social

«Les mathématiques ont un aspect très social», souligne Dill, pour sa part. "Vous échangez constamment des idées avec d’autres personnes." Par exemple, dans la «Table Ronde de Bernoullis», qu’il a contribué à organiser: une plateforme pour les doctorants qui débattent sur leurs domaines de spécialisation. «Vous sortez des sentiers battus», dit Dill. Même si ce groupe est bien sûr composé de personnes partageant les mêmes idées qui, comme Dill, aiment les énigmes, le «brainstorming», posent et résolvent des problèmes qui ont tendance à ne pas exister dans la vraie vie.

Gabriel Dill a également abordé un tel problème dans sa thèse à l’Université de Bâle. Il s’agit d’un sous-domaine de la théorie des nombres, la «géométrie diophantienne». Diophantus d’Alexandrie est un ancien mathématicien et est considéré comme l’un des fondateurs de l’algèbre et de la théorie des nombres. Les «équations diophantiennes», dans lesquelles on recherche des solutions spéciales (par exemple entières), portent son nom. Une question pourrait être par exemple: quels nombres entiers sont des aires de triangles rectangles avec des longueurs de côté rationnelles? La «géométrie diophantienne» utilise quant à elle la géométrie des objets, qui sont définis par des équations diophantiennes, pour résoudre les équations. Une conjecture célèbre, jusqu’ici seulement partiellement prouvée, établit un lien entre la géométrie et l’arithmétique. Dans sa thèse, Dill a prouvé cette hypothèse dans certains cas particuliers.

«Des idées originales, techniquement polyvalentes et ambitieuses»

C’est un monde difficile à comprendre pour les non-initiés. Pour les initiés, cependant, une chose est claire: la thèse de Dill est «ambitieuse, techniquement polyvalente et contient des idées originales», comme l’a écrit le jury. «Ce prix est une grande joie pour moi», déclare le jeune homme de 27 ans. «Je suis fier de ma thèse et j’ai le sentiment d’avoir fait du bon travail.» Pour d’autres, cela peut sembler arrogant et complaisant. Ce n’est pas le cas avec Gabriel Dill: dans la conversation, il devient clair qu’il n’est pas motivé par un désir de reconnaissance ou une volonté de compétition. Il est, à proprement parler, le prototype d’une personne à la motivation intrinsèque.

Ayant grandi à Bâle avec un frère de 6 ans son cadet, il a découvert très tôt qu’il avait un penchant pour les défis intellectuels. Au gymnase, il a pris le latin et le grec - tout comme ses parents l’ont fait. Le modèle de son travail de maturité était la diatribe de Sénèque à propos de l’empereur Claudius. C’était l’époque où Berlusconi faisait la une des journaux avec ses excès de «bunga bunga». C’était un bon point de départ pour le gymnasien qui a écrit sa satire sur le futur empereur romain en deux langues, soit en allemand et en latin. Lorsqu’il en parle aujourd’hui, quelque chose brille dans son regard et on ressent le plaisir que la rédaction de ce travail a dû lui procurer.

Et même s’il peut sembler aujourd’hui que Gabriel Dill ne vit que pour les mathématiques, pour lui il y a aussi un monde à l’extérieur. Il a joué du violon de manière intensive jusqu’à ce qu’il déménage à Oxford, où il effectue des recherches postdoctorales jusqu’au printemps prochain. Il est ainsi membre de Juso Basel, aime la randonnée et aime l’écriture créative.

On peut imaginer Gabriel Dill comme une personne heureuse. Une sorte de philosophe qui n’a pas oublié sa curiosité d’enfant. «Les mathématiques sont en fait un langage qui comprend et explique de nombreux phénomènes naturels», explique-t-il, s’appuyant ainsi sur la définition des mathématiques comme étant une «science auxiliaire». Mais il va plus loin: «Vous pouvez aussi simplement explorer ce langage comme un univers pour vous-même.»

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Image : M. Feldmüller, G. J. Crescenzo, ETH Zürich / N. Pitaro, M. Bosshard

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